21 avril 2014

WallS et le modèle Grec : les gens meurent faute de soins...


Un tiers de la population grecque est aujourd’hui privée d’assurance maladie et n’a plus d’accès aux soins de santé. Des milliers d’enfants ne sont plus vaccinés. La santé publique est-elle en péril en Grèce ? Nous avons interrogé Olga Siantou, infirmière à Athènes, membre du secrétariat du PAME, le Front militant syndical, et membre du conseil général d’ADEDY, la confédération syndicale des travailleurs du secteur public.
A la télévision, on a pu voir des images de services d’urgences bondés, de malades qui ne peuvent payer leur traitement, de manque de personnel… Et, entre 2009 et 2012, le budget de la santé a été réduit de 30%. Les mesures d’austérité imposées dans la santé publique sont apparemment lourdes de conséquences…

Olga Siantou : Effectivement, et le budget 2014 prévoit une nouvelle réduction de 12,5% des dépenses sociales et de 19,7% des dépenses publiques de santé. Le financement public de l’Office national des services de santé (EOPYY) est réduit de 30%, et, pour les hôpitaux, de 32%, c’est-à-dire 5 milliards en moins ! Chaque année, les coupes sont plus importantes.

Ces chiffres expliquent les scènes d’horreur dans les hôpitaux mais aussi dans les quartiers populaires et les îles. Le service des urgences de l’hôpital Evangelismos d’Athènes, un des plus grands hôpitaux publics, ressemble à une zone de guerre depuis que le gouvernement de coalition Nouvelle Démocratie (conservateurs) et PASOK (sociaux-démocrates) a fermé plusieurs hôpitaux à Athènes. Il y a des queues interminables devant les guichets, des listes d’attente de 5-6 mois pour une consultation. Des patients qui ont eu un accident vasculaire cérébral (AVC) doivent attendre 8 à 10 heures pour subir un scanner cérébral, d’autres attendent des examens sur des civières aux urgences pendant 24 heures avant d’être transférés dans une chambre. C’est une véritable cruauté. Malgré les efforts du personnel, cette situation coûte des vies humaines. Des lits avec tout l’équipement nécessaire dans des unités de soins intensifs ne sont pas opérationnels à cause du manque de personnel. En même temps, des patients ayant besoin d’une assistance respiratoire sont installés sur des lits d’appoint au lieu d’être aux soins intensifs.

Des patients quittent l’hôpital, livrés à leur sort, parce qu’ils ne peuvent pas payer les examens ni l’hospitalisation. D’autres ne peuvent acheter leurs médicaments. Des gens meurent parce qu’ils n’ont pas eu le traitement nécessaire à temps.

Quatre hôpitaux des caisses d’assurance maladie et huit hôpitaux publics d’Athènes et de Thessalonique ont été fermés. D’autres hôpitaux ont été fusionnés. D’ici 2015, des hôpitaux psychiatriques et d’autres hôpitaux fermeront et le personnel sera mis en disponibilité ou purement licencié. Le nombre de lits d’hôpitaux dans tout le pays comme celui de postes de personnel statutaire a diminué. 10.000 lits ont été supprimés. Le recrutement de personnel statutaire a été arrêté.
Le taux de chômage en Grèce a atteint, en novembre 2013, le record de 28%, soit plus du double de la moyenne européenne (12,1%). Chez les jeunes, il est de 61,4% ! Quand on sait que ces chômeurs sont privés d’allocations et de couverture sociale après un an, la gratuité des soins pourrait être à l’ordre du jour ?

Olga Siantou : Pas du tout ! Au contraire, des mesures sont prises pour renforcer la gestion des hôpitaux comme des entreprises, selon la logique recettes-dépenses. La plus grande partie des dépenses est couverte par les caisses d’assurance et les patients. Les personnes qui ne sont pas assurées doivent payer leurs soins dans certains hôpitaux, tandis que, dans d’autres, elles doivent remplir une « déclaration d’engagement » à payer le coût des soins. Si elles ne payent pas, cette dette sera prélevée par le service des impôts. Les dettes des milliers de chômeurs et de non assurés sont transmises aux impôts. Ces dettes se rajoutent aux nouveaux impôts qui frappent les familles grecques.

Alors que les contributions pour la sécurité sociale, les impôts et les taxes sur les produits de consommation populaire augmentent, des acquis du passé sont retirés. Une grande partie des examens médicaux étaient gratuits pour les assurés. Aujourd’hui, certains examens sont facturés aux assurés, entièrement ou partiellement, et certains remboursements ont été plafonnés. Un plafond a par exemple été imposé au remboursement des tigettes de taux de sucre et d’autre matériel nécessaire aux diabétiques. Les assurés doivent désormais payer de leur poche les mammographies et les examens prénataux, y compris les échographies. De nos jours, le suivi prénatal devrait être gratuit et obligatoire, à charge de l’Etat, pourtant il coûte extrêmement cher. Cela a conduit à la naissance d’enfants atteints de malformations incurables qu’on aurait pu prévenir.

Les campagnes publicitaires publiques essaient de nous convaincre que se faire vacciner contre telle ou telle maladie est une responsabilité personnelle, à l’instar des messages comme « fumer nuit gravement à la santé ».

L’allocation d’accouchement a été supprimée pour les femmes qui accouchent dans un hôpital public, ensuite pour celles qui accouchent dans une clinique privée. Le manque de matériel dans les laboratoires du secteur public a obligé les assurés à s’adresser au secteur privé et à payer 15% des frais.

Les hôpitaux publics subissent la pression des monopoles des médicaments, du matériel sanitaire, de la gestion des déchets, de la restauration, de l’informatique (Intracom par exemple), des services de sécurité et de propreté, des banques et compagnies d’assurance, etc.

En même temps, le gouvernement veut baisser le coût du fonctionnement des hôpitaux avec le démantèlement des droits des travailleurs. De plus en plus de travailleurs travaillent dans plusieurs programmes que le gouvernement met en place avec des fonds de l’UE au nom de la lutte contre le chômage.

Par ailleurs, des mesures sont prises pour « libéraliser » les métiers de la santé et réduire le taux de profit des pharmaciens au bénéfice des monopoles des médicaments.

La bonne volonté du personnel ne suffit pas pour traiter des milliers de patients tous les jours quand l’État ne fournit pas les moyens nécessaires en infrastructure, personnel, équipement, matériel sanitaire etc.

L’hôpital Métaxa, spécialisé dans le traitement du cancer, ne dispose que 50% du personnel nécessaire. Presque toutes les équipes n’atteignent pas le personnel minimum prévu par le seuil de sécurité. Dans le même hôpital, la liste d’attente d’un patient atteint du cancer pour une radiothérapie varie entre 2 et 4 mois. Or le cancer n’attend évidemment pas !
 
Tim Joye et Cécile Chams
Source

Paul : Aucune révolution n'a éclaté en Grèce, le seuil de tolérance à la misère de l'humain est incroyablement élevé et nos maîtres le savent ! Les révolutions ne sont possibles que si elles sont organisées par un groupe d'influence disposant de moyens, comme la bourgeoisie en France, qui a créé de toutes pièces la révolution française pour prendre le pouvoir. Les vraies révoltes populaires, elles, sont toujours écrasées dans le sang.

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