29 novembre 2014

Le crépuscule des oligarques


La semaine dernière, j’ai publié une prédiction osée :

Je vois les élites politiques et leurs marionnettistes oligarques devenir une espèce en voie de disparition, avant que les populations, y compris leurs propres gardes du corps, ne se retournent contre eux.


Comme d'habitude, je n’ai fait aucune tentative pour préciser ce que j’entends par «avant longtemps», parce que faire des prédictions est un jeu de dupes. Et, comme d'habitude, j’ai eu une avalanche de courriels exprimant un large éventail d’opinions, mais tous avaient le même sentiment : « ce ne sera pas de sitôt ! »

Certaines personnes pensaient que le peuple, constitué de clowns suralimentés et zombifiés, accros à Facebook et au porno Internet serait peu enclin à faire la révolution. D'autres pensaient que l'oligarchie parviendra à manipuler les marchés financiers, et à détruire un pays après l'autre afin d’aspirer toute la richesse restante des populations pour pouvoir maintenir la consommation aux USA, ce qui apaiserait la populace : du pain et des jeux pour toujours... Les gardes du corps ne seraient pas susceptibles de se rebeller, ont précisé certains, parce qu'ils sont très bien payés !

Pour en revenir à l'essentiel, c’est un fait assez évident et de plus en plus largement reconnu que l'empire américain, ses bases militaires, la Réserve Fédérale, le FMI et la Banque mondiale, sont en voie de disparition. Et c’est un fait bien connu que les empires qui ne parviennent plus à s’imposer, transforment les élites aux postes de pouvoir, les privilégiés, en punchingballs et têtes à claques. Curieusement, personne n'a mentionné l'un des mécanismes par lesquels cette transformation a tendance à avoir lieu, j’ai donc pensé à l’ajouter.

Premièrement, lorsque les empires commencent à s’effondrer, cela se manifeste de plusieurs façons. L’une est la perte de contrôle périphérique, comme une piscine qui fuie de partout et que l’on essaierait de colmater avec des rustines. L’autre est la perte de contrôle de la manipulation de la violence. Quand beaucoup d’organisations violentes entrent en scène, le pouvoir central est obligé de les monter les unes contre les autres et de traiter avec certaines. Quand la déliquescence progresse, les organisations violentes développent leurs propres mécanismes, ce qui inévitablement inverse le flux de la coopération dans l'autre sens : au lieu de coopérer avec ceux qui précédemment détenaient le pouvoir, elles exigent que les personnes anciennement au pouvoir coopèrent avec elles. Et c’est ici que la scène devient sanglante.

Les organisations violentes ont tendance à suivre certaines règles. Elles forment des bandes armées en recrutant de jeunes hommes, sans avenir et prêts à n’importe quoi, source prolifique dans un empire qui s’effondre. La bande armée est une structure totalitaire, dans laquelle les recrues font allégeance absolue à l'organisation et passent par un rituel initiatique, qui implique souvent un assassinat arbitraire. Dans le cas de groupes aussi radical que l’ISIS, cela peut impliquer l’assassinat de masse. Il y a une rupture nette avec les anciennes valeurs, une société qui s’effondre n’est plus motivée par l'argent et l’image sociale, ces groupes organisés sont motivés par l'honneur et le prestige au sein du groupe. Une autre caractéristique est la radicalisation au sein de ces groupes, qui influe sur le type de guerre à mener. Alors que les forces militaires officielles suivent certaines règles d'engagement, comme essayer d'épargner les civils, des femmes et des enfants, et ont pour but la reddition de l'ennemi, des négociations, ces groupes visent simplement l’extermination, et, comme tout exterminateur il vous dira qu’exterminer les hommes adultes d'une population n’est pas aussi efficace que d’exterminer leurs enfants. Ce niveau de radicalisation a lieu en ce moment parmi les néo-nazis d’Ukraine, dont les escadrons de la mort ciblent spécifiquement les écoles et les maternités dans l'est du pays. Des charniers d’écoliers tués par l'artillerie ukrainienne ont récemment été découvertes. Si vous pensez que l'Ukraine est trop extrémiste pour que son exemple s’applique aux États-Unis, détrompez-vous : l'Oncle Sam et la mariée ukrainienne ont beaucoup en commun.

Bien sûr, de telles pratiques sont contraires aux aspirations de la population en temps normal, mais ici, nous rencontrons un autre aspect clé : terrorisée par les bandes armées, la population devient impuissante à agir. Le niveau de la dissonance cognitive entre les messages publics qu'ils entendent et la réalité quotidienne à laquelle ils sont soumis amènent la population à devenir psychotique. C’est le cas dans l’Ukraine d'aujourd'hui, où la plupart des hommes enrôlés, se trouvent être psychologiquement perturbés et suivent n’importe qui pour faire n'importe quoi. Pour l'instant, les oligarques ukrainiens et leurs marionnettistes de la CIA font corps, en jetant des groupes radicalisés sur un ennemi créé de toutes pièces : les "séparatistes russes", alors que la plupart du pays est contrôlé par des mercenaires engagés par les oligarques, à qui la junte pro-américaine installée à Kiev a remis les gouvernements régionaux. Mais cette campagne punitive est catastrophique, avec des pertes hallucinantes et aucune victoire à annoncer. C’est une question de temps avant que les groupes radicalisés ne se retournent contre ceux qui les ont envoyés au massacre : la junte et les oligarques.

Les oligarques sont protégés par leurs gardes du corps et divers services de sécurité : des mercenaires. Ces gens sont payés pour se battre, et l'argent s’avère être beaucoup moins efficace comme facteur motivant que l'honneur et l'allégeance dans une bande armée. Dans son chapitre sur les mercenaires, Machiavel souligne une constante à leur sujet : ils préfèrent s’enfuir plutôt que de mourir. Cela est vrai même aujourd'hui : en Ukraine, les mercenaires américains et polonais, qui sont payés par la junte de Kiev, ont été peu vu dans les combats, ils ont été la plupart du temps tenus à l'écart des zones où le nombre de victimes était élevé. Certains mercenaires polonais ont été sur les lignes de front, ils y sont morts. Certains ont dit que c’était parce que leur assurance-vie était bon marché ! Mais le principe tient toujours : ne vous attendez pas à ce que des mercenaires meurent pour vous; ils travaillent pour l'argent, et travailler pour l'argent implique de rester en vie pour le dépenser !

Et il va de soi que la lutte entre les bandes armées et les oligarques sera courte et inégale : les gardes du corps et les mercenaires de l’oligarchie s’enfuiront, et les bandes armées prendront le relais. Certaines actions qui en découleront seront choquantes; tandis que les élites et les oligarques seront plutôt bien défendus, du moins initialement, leurs enfants, installés dans diverses écoles pour élites en devenir, académies et universités, seront des cibles faciles, préparant le terrain pour des enlèvements et des fusillades de masse d'un genre très différent de ceux observés à ce jour. La population va faire la guerre à tous les groupes d’influence, la revanche... Les vieilles élites politiques et leurs marionnettistes oligarques vont disparaître de notre vue.

D. Orlov
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