10 août 2017

Vieux-Pays de Goussainville : village fantôme ?

Le hameau, trop proche d'une des pistes de l'aéroport de Roissy, s'est arrêté en 1973. Au premier regard, on ne voit que les maisons en ruine. Mais ne parlez surtout pas de village fantôme...

C’est peut-être parce que c'était un jeudi après-midi et qu’il pleuvait sans discontinuer sur Paris. Par ce temps à ne pas traîner dehors, le Vieux-Pays de Goussainville (Val-d'Oise) avait un air lugubre plus prononcé encore qu'à l'habitude. Rue Brûlée, le décor est saisissant avec sa dizaine de maisons inoccupées de part et d’autre. Partout des toits troués, des fenêtres cassées, des pans de murs tagués et des objets qui traînent au sol. Et que dire de la maison de maître, qui surplombe le parc derrière l’église ? En lambeaux elle-aussi, elle n'égaye pas l'atmosphère.

Bloqué en 1973

Alors, oui, c'est vrai, le Vieux-Goussainville a des allures de village fantôme. Le terme revient souvent dans les articles qui s’accumulent sur ce hameau, désormais quartier de Goussainville mais qui en a été autrefois le cœur jusqu’à ce que l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle installe une de ses pistes à deux pas de là. C’était en 1973. Goussainville se retrouve en bout de piste dans l'axe de décollage des avions et déménage alors son centre à quelques kilomètres de là. Le Vieux-Pays se vide, bien aidé par Aéroport de Paris (ADP). « Ils proposaient de racheter les maisons le double de leur prix », raconte Alain Figuière, président de l'association des habitants du Vieux-Pays et conseiller municipal à Goussainville.

Mais rien y fait. 300 personnes ne veulent pas bouger et, manque de bol, ADP ne peut rien faire des 80 maisons qu'elle a acheté. L'église romane est classée et empêche toute démolition. Ainsi commence la légende du Vieux-Pays, condamné à voir ses maisons dépérir. Paradoxalement, elles attirent de plus en plus les curieux. Et pas que des passionnés de photographies. Alain Figuière parle aussi de gens qui s'introduisent illégalement dans les maisons, de shooting de mode, de tournages de clip voire de film pornographique.

La fin du Vieux-Goussainville ?

Une situation qui déchire le cœur d'Eric Fournier. Il n'habite pourtant pas le Vieux-Pays et n'y a mis d'ailleurs les pieds « que cinq à six fois ». Mais le photographe, passionné de vieilles pierres, a même mis en ligne, la semaine dernière, « le testament du Vieux-Pays ». Une vidéo de cinq minutes dans laquelle l'artiste l'assure : « Le Vieux-Pays de Goussainville, c'est fini. Les toits s'effondrent de plus en plus, le hameau n'a pas quarante nouvelles années à vivre. »

La vidéo vise juste à réveiller les consciences. « A relancer le débat, précise Eric Fournier. Il y a plein de choses à faire pour retaper à moindre frais les maisons les plus en ruine et installer pourquoi pas de l'activité au village. »

Au village justement, ce clip passe assez mal. « Il est à côté de la plaque », estime Alain Figuière. Eric Fournier y fustige beaucoup l'aéroport, le bruit des avions. « Mais au Vieux-Pays, le problème n'est pas là, poursuit l'élu. Nos maisons sont très bien insonorisées, plus personne ne prête attention aux avions qui passent. »

« On n'est pas malheureux ici »

Bien sûr, le Vieux-Pays ne seraient pas contre quelques travaux. « Les toits menacent de s'effondrer sur certaines maisons, raconte Alain Figuière. Mais la préfecture refuse tous les permis de rénovation et les bâtiments de France, de son côté, empêche toute démolition. » Toujours cet imbroglio administratif !

Les 350 habitants du Vieux-Pays se sont fait une raison. « Nous sommes pas malheureux ici, lance Alain Figuière. Qu'on arrête juste de dire que c'est un village fantôme. » La preuve, ce week-end, le hameau organisait un festival de jazz et mardi sera jour de rentrée à l'école maternelle de la rue Brûlée.



Fabrice Pouliquen

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